La luciole des près
- Gérald Devémy
- 5 mai 2023
- 4 min de lecture

Une petite Luciole perdue dans un près
Une nuit de printemps
Seule s'ennuyant à éclairer
Ces herbes de brins géants
Cheminant heureuse malgré tout
Cherchant avide à qui parler
A un ami, et perchée sur un caillou
Elle héla au hasard une fée
Qui passait affairée et pressée
Marchant allègre d'un pas sûr
"Bonjour la fée, dis moi où trouver
Une âme bienveillante et pure
Avec qui doucement vivre
D'air frais léger et doux
Dormir au sol blanc de givre
Et des colliers de perles au cou"
"Les fées ne savent qu'exaucer
Des vœux aux gentils êtres
Et des conseils ne sauraient en donner
Sauf à aider aux petites choses à naître"
3comment vais-je pouvoir vivre
Ainsi à errer affreusement seule
Dans ce vaste monde et poursuivre
Avec dans mon âme tant de bleus
D'amour triste et chagrins
Je sais pourtant qu'il m'attend
Tapis caché et ma petite main
Il la prendra, magique par un chant"
La petite fée alors voyant
Dans ses yeux tant de tristesse
Lui dit : "pendant qu'il est temps
Court! Court! Sans faiblesse
A la rivière un saule pas loin
Savant et sage il te dira
Quoi faire et comment ton besoin
Par ta soif et passion il assouvira"
Heureuse et pleine de joie
Brillante de milles feux
Elle s'en alla en ayant foi
De nouveau et lui dit adieu.
Parcourant les guirlandes
Scintillante et mirifique
De rosée sur la lande
En cette nuit magnifique
Elle chemina, lanterne éclairée
Pleine d'espoir et d'ivresse
Vers le bonheur espéré
Le cœur gonflé et plein de liesse
Derrière un Viel arbre grincheux
Elle le vit, sur les flots perché
Le tronc frémissant, majestueux
Buvant, perdu en pensées
S'approchant avec précaution
D'une gracieuse révérence
Le salua attisant son lampion
Et de sauts gracieux et de danses
Lui parla de son triste malheur
Tant de solitude et de paroles
Qui s'envolent dans la douleur
Comme des myriades de fumerolles
Sorti des ses songes le Vénérable
Toussant, de ses racines tassant
Le sol, l'eau, et de ses bras friables
Pris la luciole fragile lui si puissant
"Hum, hum! Hom, hom! que voilà
Une petite limace qui trouble
Mes rêves de boues, de fleurs et de dahlia
Dans le courant clair de flots bleus"
"Votre magnificence savante
Je viens par là vous demander
En toute humilité et bienveillante
Où trouver une âme à aimer?"
"Hum, Hum! Hom, hom! petite sauterelle
De vents, de pluies, de songes d'été
Des nuages blancs dans le ciel
Je peux sans cesse en parler
Mais d'une âme à aimer
quelle étrange demande
D'un vermisseau en vérité
Au lieu lieu de profiter de la provende
Que nous donne l'eau claire
Les près verts et onduleux
Nos landes et nos tourbières
Les champs humides et marécageux?
Petite loche à lumière
Je ne saurais t'aider
Ni être muet comme une pierre
Sauf au Silure demander
Où trouver enfin ta réponse
Lui qui sans cesse parcours
Les fonds, les buissons et les ronces
Dans le pays il peut être ton secours."
Sur ces mots vigoureux et clairs
Elle longea le long ruisseau
Parmi els joncs, les iris et les lierres
Cherchant le Silure sans repos
Blop, Blop! Boues vases et roseaux!
Réagis le Silure devant elle
"Je me nourris de larves et vermisseaux
Que viens-tu sous ce beau ciel
M'ennuyer de tes billevesées
Me parler d'une âme sœur
Qui t'attend énamourée
De ton image et de ton cœur?
Moi qui ne rêve toujours
De courants frais et chantant
Je ne peux t'aider ce jour
Si ce n'est en racontant
Qu'une belle nuit comme aujourd'hui
Nageant agile sous les frondaisons
Une belle voix j'entendis
Parlant sans fin des saisons
Du temps cruel qui passe
Et de toutes choses qui trépassent
Et de son amie la lune Mère
De tous les poètes la muse
Des cœurs tendres la gardienne
Vers qui tous les regards fusent
Dans une prière païenne
Ce n'est peut-être que le hasard
Que dansant l'onde joyeuse
Je cueillis sous mes nageoires
Cette chanson triste mais radieuse
Va par ce chemin lumineux
Avec ta lanterne éclairée courant
Rencontrer enfin ce demi dieu
Que tu désespère en vain et souffrant."
Heureuse enfin de son destin
Elle ondula sans pressée sans panique
Vers cet oracle pèlerin
Dans la lumière sélénique
Perché sur une branche basse
Contant charmeur à la lune
Des rêves de princesse lasse
Et de contes de fortune
Elle le vit auréolé de lumière
Le visage enfantin, l'âme sereine
Comme dans un songe lunaire
Entouré de curieuses phalènes
S'approchant timide exaltée
Attisant fière sa lumière fragile
Sentant enfin sa quête exaucée
Elle dansa une volte gracile
Mais le poète la tête dans les étoiles
Ne vis ni la danse ni la lumière
La luciole alors déploya ses voiles
Et vola vers le poète sans manière
Etonna de tant d'audace et surpris
Il dévisagea cette surprenante effrontée
Et comme une douce brise languissante
Il l'aima de tout son cœur sans délais
C'est alors que devant tant de passion
La fée et la lune de concert
Pris ces deux âmes sans façon
Et les amena au pays toujours vert
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